Enjeux et perspectives de la consommation collaborative
Interact
À partir de 2007, la crise financière et économique mondiale a provoqué dans les pays industrialisés une brusque montée du chômage, une baisse du pouvoir d’achat des ménages ainsi qu’une déstabilisation du système bancaire mondial. Les effets de la crise ont agi comme un catalyseur de tendances de fond observées depuis quelques décennies (mouvements altermondialistes, critiques du système agro-industriel intensif, etc.) et ont intensifié un questionnement citoyen sur les modes de production, de financement et de consommation actuels. Cette remise en question a notamment été illustrée en 2011 par des mouvements comme celui des Indignés en Espagne ou Occupy Wall Street aux États-Unis, promouvant un modèle de société plus responsable. Les pratiques visant à échanger et à partager des biens entre particuliers ainsi qu’à limiter les intermédiaires entre producteur et consommateur ont connu un engouement progressif; donnant naissance à un ensemble d’initiatives rassemblées sous l’appellation de consommation collaborative. Ce mouvement récent et grandissant s’appuie sur des pratiques prénumériques telles que les Systèmes d’Échanges Locaux (SEL), qui ont vu le jour en France au début des années 90. Il s’agit de systèmes d’échanges de produits ou de services entre les adhérents d’un même groupement associatif, selon une unité propre à chaque groupe. On peut également mentionner les Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne (Amap), qui permettent aux consommateurs de s’approvisionner directement auprès du producteur, ou encore les recycleries qui collectent, réemploient et valorisent des objets de seconde vie depuis 1984. La popularisation de ce phénomène et son essor à grande échelle ont notamment été permis par la forte démocratisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), se traduisant par des taux d’équipement en informatique particulièrement élevés. Les NTIC ont contribué au développement de plateformes internet accessibles au plus grand nombre, permettant de mettre en relation des particuliers ne se connaissant pas au préalable pour réaliser des transactions. Les NTIC et le e-commerce ont également contribué à faire évoluer la relation unissant consommateurs et entreprises en modifiant les manières de s’informer et en démultipliant les possibilités d’interaction et de coopération. Les années 2010 ont vu l’émergence d’un mouvement d’empowerment du consommateur, qui s’implique de plus en plus dans les transactions et se positionne comme un "consommacteur" exerçant une influence sur la marque, les prix et les produits/services (forum deconsommateurs, appels à idées, customisation de produits, comparateurs de prix, etc.). Le rapport de force se modifie notamment dans les pratiques de consommation collaborative, pour lesquelles le consommateur passe du statut unique de "demandeur" à un double statut d’"offreur-demandeur".